La fête battait son plein. Nadia était avec ses amis en train de boire de façon plutôt inconsidérée, à l’orée de la forêt. Ils étaient six, six Quartz qui avaient décidé de profiter des températures plus que convenables qu’offrait l’Australie nocturne pour prendre du bon temps. Elle les connaissait depuis toujours, ou en tout cas, c’était tout comme. Ses amis, ses frères et soeurs, sa vraie famille. Elle se servit un shot de vodka qu’elle but sur-le-champ, avant de se lever. Tout le monde explosa de rire quand elle fit un pas de côté. Elle avait très clairement bien trop bu.
“De toute façon” dit-elle avec une voix qui trahissait son état d’ébriété, “vous êtes même pas cap d’aller dans la forêt.” “Non mais redescends, toi ! Tu fais comment pour boire si t’es si loin de ton verre ?” répondit un des ados. “Qu’est-ce que tu veux qu’on aille foutre dans la forêt ?” demanda sa meilleure amie qui était visiblement bien éméchée aussi. “C’est moche, on capte rien, et on va se casser la gueule tout le temps. Regarde ! Même toi tu tiens pas !” Elle poussa tant bien que mal la jambe de Nadia qui réussit à tenir debout. “OK, je vois.” réagit cette dernière. “Je vois… Je vois que vous avez laissé vos couilles chez vous avant de venir ! Moi, je suis peut-être une fille, mais j’ai plus de couilles que toi, et que toi, et que toi aussi. J’ai plus de couilles que vous tous. Moi, j’vais découvrir un trésor super cool que personne n’a vu parce que personne n’a de couilles.”
Des protestations s’élevaient, quelques insultes amicales fusèrent, certaines plus douteuses que d’autres, rien qui n’empêchât Nadia de s’enfoncer dans les bois obscurs. La luminosité ne laissa pas très longtemps la possibilité à ses amis de maintenir un contact visuel et elle s’effaça derrière des buissons.
“Je suis même pas tombée !” cria-t-elle. “Moi non plus, mais je suis assise !” répondit sur le même ton sa meilleure amie. Elle n’eut pas de réponse.
Le silence se fit pesant très vite. Une impression étrange s’empara du groupe, tous en même temps. Ils se regardèrent, et appelèrent d’une seule voix.
“Nadia ? Nadia ?! Nadia !!!”
Ils finirent par entendre, depuis quelque part dans la forêt, un hurlement strident. C’était elle. Ça ne pouvait-être qu’elle.
“Loik ! Va chercher le CPE ! Il se passe un truc pas cool !”
Le dénommé Loik se leva, faisant fi de son ébriété, et courut, le plus vite possible. Plusieurs minutes plus tard, il revint, à bout de souffle, précédé par Kaine.
“Vous avez intérêt à vous présenter à mon bureau demain matin. Sinon je viendrai vous chercher. Et vous ne voulez vraiment pas que je vienne vous chercher par moi-même, pas vrai ?”
Il s’enfonça à son tour dans la forêt, seul. Aucun des amis n’osait parler. Le temps sembla d’une longueur infinie, chaque seconde ponctuée du silence devenait une éternité. Un nouveau hurlement s’éleva. Celui-ci n’avait rien d’humain… Il fut suivi d’assez près par un bruit sourd et un grognement. Après quelques instants, Kaine réapparut, reconnaissable malgré des blessures violentes. Son oeil était tombé de son orbite et un énorme trou siégeait dans sa poitrine. Par Dieu sait quel miracle, il tenait toujours debout…
Puis vint un mouvement. Une ombre bougea. Il y eut un craquement. La main de Kaine se tendit vers les adolescents. Une dernière respiration, suppliante, s’arracha de sa trachée alors que son corps s’effondra et révéla un trou à la place de tout l’arrière de sa tête. Sa cervelle flottait toujours derrière lui, comme tenue par l’obscurité. Il y eut un nouveau mouvement. La cervelle disparut. Un hurlement inhumain s’éleva à nouveau.
Le lendemain, toute l’académie apprit la nouvelle.
Kaine était mort en essayant d’aller chercher Nadia Telnar, toujours portée disparue...
